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Pourquoi nous avons tant de mal à ne pas procrastiner

On remet la vie à plus tard et pendant ce temps, elle s’en va - Sénèque

Oui, oui, je m’y mets…dans 5 minutes.

D’abord je me fais un café et je m’accorde 10mn sur Linkedin.

Et puis je réponds à ce mail qui vient d’arriver.

Zut, quelqu’un m’appelle. C’est peut-être important.

Ah, maintenant je n’ai plus assez de temps pour vraiment m’y mettre avant la prochaine réunion. C’est pas grave, je commencerai après le déjeuner.

Bon, ça y’est, je commence.

Mais avant, je dois juste finir de lire ce dernier document pour être sûre d’avoir toutes les infos. Ohlala et puis c’est le bazar sur mon bureau. Je vais ranger mes papiers, j’aurais l’esprit plus clair ensuite pour être vraiment efficace.

16h30. Je m’y mets.

16h40. Katy vient de me demander un point projet en urgence. Il faut que je m’en occupe.

18h. Je dois finir de travailler pour aujourd’hui. Le projet est au point mort.

C’était une journée en Procrastinie, le pays où les tâches prévues sont perpétuellement remises à plus tard à grand renfort de mille bonnes excuses, stratégies de contournement et petits arrangements.

Attention ! La Procrastiner n’est pas la Flemmardie ! On peut procrastiner et accomplir une multitude de choses… mais toutes différentes de celles qu’il faudrait vraiment qu’on fasse.

Les symptômes : c’est quoi, la procrastination ?

Tu sais que tu te trouves en Procrastinie quand :

  • Tu retardes souvent des décisions jusqu’à ce qu’il soit trop tard
  • Tu peux passer un temps fou à te préparer à l’action
  • « Je le ferai demain » est ton mode par défaut
  • Tu es imbattable en fabrication d’excuses pour ne pas t’y mettre. « Encore 5 min de ci » « d’abord je dois faire ça »
  • Tu traînes constamment dans ta todo list des tâches pendant des semaines voire des mois
  • Tu as raté des occasions, des événements ou perdu de l’argent parce que tu as attendu la dernière minute pour agir
  • Tu cèdes facilement aux distractions quand tu démarres une activité
  • La liste de ce que tu as fait à la fin de la journée ressemble rarement à celle de ce que tu avais prévu de faire au départ

Tu t’es reconnu.e ?

Alors j’ai un scoop pour toi : tu es un être humain.

Eh oui. Procrastiner est un comportement tout à fait normal qui trouve son explication dans le fonctionnement de notre cerveau.

John Kelly illustre à merveille ce qu’est la procrastination dans ce court-métrage :

Je procrastine, tu procrastines, nous procrastinons…

En tant qu’êtres humains, nous sommes câblés pour chercher le plaisir et fuir l’inconfort (Loi de Laborit).

En mode automatique, nous sommes conditionnés à privilégier l’activité qui requiert un minimum d’effort pour un maximum de gratification immédiate .

Avant chaque action, notre cerveau évalue le rapport entre ce qu’on gagne à agir (bénéfices, récompenses, risques évités…) et l’effort estimé pour faire cette action (qui n’est donc pas toujours égal à l’effort réel). En fonction du résultat, le cerveau décide d’agir…ou non.

La procrastination est la traduction directe de ce mécanisme.

Chaque fois que l’on procrastine, une bataille interne se joue en nous, entre le moi-futur, qui cherche à nous convaincre d’agir au nom des conséquences à venir (obtenir des récompenses ou éviter des déboires), et notre moi-présent, qui cherche à maximiser immédiat et à éviter l’effort.

Résister à ce mode automatique demande de déployer beaucoup d’énergie. Plus l’effort à déployer est important, ou plus le résultat attendu est faible ou incertain, et plus il nous faudra puiser dans des trésors d’énergie pour réussir à agir.

Notre vulnérabilité face à la procrastination dépend donc d’une multitude de facteurs : la facilité des tâches à faire, notre aisance et maîtrise de ces tâches, notre plaisir et notre intérêt à les accomplir, la clarté des objectifs et des résultats attendus, la présence ou non de récompenses en cas d’atteinte du résultat, mais aussi notre niveau d’énergie, notre environnement, notre charge de travail et la facilité avec laquelle notre cerveau arrive à résister aux tentations.

Or les notions d’efforts, de plaisir, de valeur accordée à telle ou telle récompense, sont des notions très personnelles. C’est ce qui explique que la procrastination peut prendre une multitude de visages.

Certaines procrastinent sur les petites tâches pénibles du quotidien tandis que d’autres bloquent plutôt sur les gros projets.

On peut procrastiner sur des prises de RDV ou des réponses au mail mais pas du tout sur le paiement de ses factures.

On peut avoir du mal à s’y mettre mais dépoter une fois lancé.e.

Finalement, la procrastination n’est pas un vrai problème en soi. Elle fait partie du quotidien.

Elle n’est problématique que lorsqu’elle devient chronique, tellement tenace qu’on s’en sent prisonniers, voire pire qu’elle amène des déboires bien réels parce qu’on n’a pas tenu parole ou dépassé un date légale etc : à un moment ça coûte cher si c’est trop grave.

Tim Urban explique avec beaucoup d’humour les tenants et les aboutissants de la procrastination :

Humain, oui, mais pas toujours écologique

Sur le long terme, lorsque la procrastination fait trop souvent barrage à l’accomplissement des objectifs que l’on se fixe, plusieurs effets délétères risquent de se faire sentir.

D’abord, la culpabilité. On sait pertinemment qu’on devrait être en train de faire une certaine tâche et on s’en veut de ne pas réussir à s’y mettre. On s’en veut aussi de ne pas avoir la force, la discipline de passer outre ce manque de motivation et ces résistances.

On a conscience que se comporter ainsi, c’est s’auto-saboter, se tirer une balle dans le pied parce que ce qu’on ne fait pas aujourd’hui, on devra le faire demain et qu’on est juste en train de se punir soi-même.

Résultat, l’estime de soi en prend un coup. On se sent inefficace, incompétent.e.

Et stressé.e., bien sûr, parce qu’on voit les heures qui défilent et nos tâches importantes qui n’avancent pas ; parce que, dans certains cas, la procrastination peut amener à tout faire à la dernière minute…voire en retard.

D’autant que, plus on repousse les tâches à faire, plus elles prennent des proportions de plus en plus grandes et insurmontables, et plus elles nous occupent l’esprit.

Double peine : non seulement on n’avance pas dans ses tâches et ses projets, mais la procrastination est en plus épuisante moralement, puisqu’elle donne lieu à une lutte interne féroce.

La procrastination : un signal à écouter

Si notre penchant naturel à privilégier la récompense et le plaisir immédiat sur les efforts et les récompenses futures est un facteur majeur de procrastination, ce n’est pas le seul. Nos conditions et environnement de travail contribuent aussi au phénomène.

La procrastination est un mécanisme de défense, qu’on déploie en réponse à certaines émotions négatives – des peurs qui nous habitent, de la pression ressentie au travail, de l’ennui…

Notre radar intérieur nous signale que la tâche à accomplir est potentiellement source d’émotions négatives ou de danger et active le bouclier procrastination pour nous l’éviter.

Par exemple, quand on a trop de choses à faire et qu’on ne sait plus où donner de la tête, quand on se sent sans cesse pressé.e par le temps et qu’on ne supporte plus de courir, quand on place beaucoup d’importance dans la nécessité de réussir et qu’on sent qu’on ne va pas y arriver, la procrastination est un signal d’alerte et un mécanisme de protection.

La procrastination n’est pas une fatalité, un mode de fonctionnement irrémédiable.

C’est pourquoi, avant d’essayer d’appliquer des tactiques pour lui tordre le cou, c’est important de comprendre les émotions en jeu et l’histoire qu’on se raconte lorsqu’on repousse au lendemain.

Qu’est-ce que je cherche à protéger ou à défendre ?

Ma tranquillité, mon confort, ma peur de l’échec, mon ennui ?

C’est essentiel pour aller à la racine du problème et éviter des solutions toutes faites qui ne seraient que des pansements sur une jambe de bois.

C’est aussi essentiel pour comprendre que l’objectif de cet article n’est pas de t’aider à moins procrastiner pour être plus efficace, mais à chercher des solutions pour alléger la charge mentale que fait peser une procrastination chronique au quotidien.

Et toi, que protèges-tu lorsque tu procrastines ?

Pour aller plus loin, découvre notre Boite à outils anti-procrastination

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